17 févr. 2012

Le front malien s’embrase à nouveau

Aucune frontière algérienne n’est stable. Inquiétant.

Et c’est reparti. Cette fois-ci, cela se passe au Mali, où un nouveau foyer de tension vient d’être relancé. A en croire les informations en provenance de la région, il serait même trop tard pour prévenir l’explosion. Il ne resterait plus qu’à tenter d’en limiter l’impact, à en amortir le choc avant de tenter de recoller les morceaux.

L’engrenage s’est mis en place depuis des mois, à la suite de la rupture des équilibres que le régime de Maammar Kadhafi avait établis dans le Sahel. Des Touaregs, alliés au dirigeant libyen, avaient regagné leurs pays d’origine après sa chute, provoquant une déstabilisation de ces pays déjà fragiles. Le Mali et le Niger, qui comptent parmi les pays les plus pauvres au monde, n’avaient pas la capacité de recevoir ces migrants, d’autant plus que ceux-ci constituaient désormais une charge alors que jusque-là, ils constituaient une source de revenus pour le pays et pour leurs familles et tribus.

Dans un environnement difficile, où se côtoient pauvreté, militants de la liberté, terroristes, officines, contrebandiers, bandits de grand chemin et agents doubles, il est extrêmement difficile de maintenir la paix. Le moindre prétexte peut servir de détonateur pour embraser une vaste région, et déborder inévitablement en Algérie. C’était une simple question de temps.

Pour l’heure, la crise semble née d’un scénario terriblement banal. Des groupes armés, se réclamant du Mouvement National de Libération de l’Azawed, ont lancé, à la mi-janvier, des opérations contre les forces gouvernementales dans plusieurs localités du nord du pays, rompant ainsi la trêve en vigueur depuis 2009. Dans la foulée, d’autres localités étaient attaquées dans les jours qui ont suivi.

Les autorités maliennes ont encaissé le premier choc, et attendu plusieurs jours avant de lancer une contre-offensive, apparemment pour évaluer les forces de leurs adversaires. L’opération de reconquête a eu lieu, elle aussi, selon un schéma terriblement banal : opération de contre-guérilla, fouilles, violence, répression, et, probablement, règlements de comptes, représailles, tortures et violations des Droits de l’Homme, dénoncées avec virulence par le Mouvement de Libération de l’Azawed.

L’engrenage s’est ainsi mis en place, en quelques semaines. C’était suffisant pour déclencher un mouvement migratoire des populations vulnérables, traditionnelles victimes des guerres civiles. Des milliers de personnes ont ainsi fui vers le Niger, le Burkina-Faso, le Sénégal, la Mauritanie et l’Algérie. Et cela donne évidemment lieu aux scènes les plus tragiques, avec ces familles dénuées de tout, arrivant à bout de forces dans des camps de réfugiés ou, pire, agonisant dans le désert.

Ce volet humanitaire, dramatique, est aggravé par l’absence de perspectives pour apaiser la situation. Bien au contraire, tout indique que ce qui se passe au Mali peut, cette fois-ci, constituer le début de quelque chose de beaucoup plus grave que les crises antérieures. Les choses y sont tellement imbriquées que plus rien n’est désormais exclu. Cela peut aller de grossières manipulations, à des jonctions entre mouvements touareg, mouvements terroristes, grande criminalité et «ingérence humanitaire».

Pour l’Algérie, le résultat sera lourd à porter. D’ores et déjà, un constat s’impose : le pays est littéralement encerclé, avec la crise du Sahara Occidental et la frontière marocaine fermée à l’ouest, une Libye en ébullition à l’est, des troubles à la frontière sud, des pressions de toutes sortes venant du nord, et un front interne en effervescence. Rien ne sera épargné à l’Algérie.

Cette complexité des problèmes est affrontée par un vide terrifiant, car l’Algérie ne dispose pas des institutions ni des instruments nécessaires pour faire face. Le pays se contente de répondre au coup par coup, en essayant de limiter les dégâts. Il subit les évènements, sans réussir à anticiper. Il pare les coups, résiste tant qu’il peut, mais finit par céder car il n’est pas en mesure d’imposer ses choix. La crise libyenne a bien révélé cette situation : l’Algérie a fini par traiter avec le CNT alors qu’en d’autres temps, il aurait appartenu à l’Algérie d’imposer son CNT.

De la Libye au Mali, c’est donc toute la frontière saharienne de l’Algérie qui est entrée en zone de turbulence. Une situation de crise partout, qui s’installe dans la durée, alors que pour l’Algérie, il est impossible d’attendre que les choses se décantent d’elles-mêmes. Il y a deux risques majeurs. Le premier, c’est de voir la situation déraper, et échapper à tout contrôle. Le second, c’est de voir d’autres puissances imposer leurs solutions. Les deux risques ne sont d’ailleurs pas exclusifs l’un de l’autre : les crises libyenne et syrienne ont montré que le chaos peut être le prélude, ou le préalable, à un changement du rapport de forces pour imposer un ordre nouveau.

L’Algérie a besoin d’un sursaut, pour définir une politique, et la mettre à l’œuvre. Ce sursaut est-il possible ?


Abed Charef,le Quotidien d’Oran http://www.lequotidien-oran.com/?news=5164069

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