1 avr. 2013

L’après-conflit au Mali

Alors que la France prévoit le retrait de ses troupes le mois prochain, des questions difficiles se posent pour le Mali et ses alliés africains, européens et internationaux. La France a pris les rênes sur place et a peut-être par la même touché un nerf colonial sensible, tant pour les Français que pour les Africains. Et qu’en est-il de l’après-conflit ? Qui prendra les rênes de celui-ci au moment où maintenir les cellules terroristes au loin est peut-être plus difficile encore que l’intervention militaire en elle-même?
Au-delà de la puissance coercitive, une solution à long terme devra passer par à un réel développement politique et sociétal du pays. Ceci est bien sûr plus facile à dire qu’à faire.

Le conflit au Mali a attiré un nouveau regard international sur un problème profond de longue date. Si le regard de la communauté internationale reste centré sur le Mali, les chances de trouver une solution collective et à long terme sont accrues.
La situation fragile au Mali n’a rien de nouveau. Depuis plus de dix ans il existe une grande inquiétude quant à la stabilité politique du pays et à son manque de développement. Quand le Mali est entré dans un véritable état de crise l’année dernière alors que son Président Amadou Toumani Toure était évincé, le manque de contrôle de l’état dans certaines régions et l’avancée de groupes terroristes sur Bamako ont mené les forces de sécurité françaises à considérer qu’il existait une menace réelle pour la sécurité du Mali, mais également pour la région dans son ensemble. En effet, nous parlons du problème global du contrôle du trafic dans des régions sous-développées, qu’il s’agisse de circulation illicite d’armes, mais également de drogues et d’êtres humains.
Le mouvement unilatéral (et peut-être quelque peu surprenant) de la France a propulsé ce problème sur le devant de la scène. Mais maintenant que l’intervention militaire arrive à son terme, la situation au Sahel commencerai-t-elle à se dégrader à nouveau? Au-delà du soutien militaire, La France, l’Europe et la communauté internationale fourniront-elles les outils de précision nécessaires à la promotion d’un véritable changement et d’un développement à long terme?
Le rôle de la France et de l’Europe : Comprendre le paradoxe malien
Sous Nicolas Sarkozy comme sous François Hollande, la France a toujours déclaré sa volonté de se tenir à l’écart de son passé colonial, mais s’est néanmoins sentie obligée d’intervenir sur le continent africain en situations de crise. La différence claire entre l’opération Licorne en Côte d’Ivoire sous Nicolas Sarkozy et l’Opération Serval au Mali sous François Hollande est l’acceptation générale de la légitimité de cette dernière.
Alors que tous regrettent qu’une solution plus locale (Malienne/Africaine) ou internationale (Nations Unies/Union Européenne) n’ait pu être trouvée, de manière générale, la population française et la population locale ont toutes deux accueilli l’arrivée des troupes françaises sur le sol malien. Contrairement à la situation en Côte d’Ivoire, la France n’a que peu d’intérêts commerciaux au Mali, ce qui lui a permis de souligner la dimension humanitaire de cette initiative. De plus, tous ceux qui étaient conscients de la détérioration de la situation voyaient d’un bon œil que des mesures soient enfin prises.
Il est important cependant de ne jamais prendre ce genre d’actions au pied de la lettre. Alors que l’intervention des troupes françaises a en effet été bien accueillie, la réalité de la guerre reste très sombre dans des zones d’une pauvreté extrême et abandonnées. En ce qui concerne la légitimité de la France, il est important de se souvenir que le gouvernement malien est né d’un coup d’état. Comment alors tirer une part de légitimité d’un gouvernent brisé et anti-démocratique ?
Nous faisons donc face à un paradoxe. La France était réticente à intervenir, mais elle a néanmoins réussi à justifier ses actions aux yeux de la communauté internationale. Elle a clairement identifié la valeur ajoutée de cette intervention militaire, qui permet de sortir le Mali d’une impasse et permet à la France de sortir grand vainqueur. Nous pourrions même ajouter que si un quelconque intérêt commercial est en jeu au Mali, la machine militaire française pourrait le renforcer, surtout face aux nouvelles restrictions budgétaires de la défense.
En revanche, la situation pour l’Union Européenne est inversée. Alors que certains considèrent que la France a pris les reines au Mali, on peut également considérer que François Hollande a fait preuve de force unilatérale. L’Europe, de son côté, a toujours préféré une démarche plus globale dans ses relations avec l’Afrique, avec pour objectif le maintien de la paix, le développement, et la démocratisation.
L’Union Européenne a déjà soutenu activement la perspective de croissance, en lançant des projets de gouvernance et des opérations de soutien à la sécurité au Niger et en Afrique de l’ouest en général. L’Europe fait donc face à un paradoxe : alors qu’elle aussi a été active et présente au Mali, les médias ont tendance à dire que ‘L’Europe est absente’ ou que ‘la France agit seule car l’Europe a été inefficace’.
Le problème est que la puissance douce et les projets de développement n’attirent pas forcément l’attention du grand public. Le développement n’est pas un ‘évènement’ ou un ‘produit fini’ dont on peut parler. Pour aller plus loin, la paix en elle-même n’est pas nécessairement un ‘évènement’ quand la guerre fait les gros titres de tous les journaux. Ainsi, la démarche générale de l’Europe qui œuvre pour un développement à long terme ne se concrétise pas en une politique concrète qui peut être mise en avant.
La démarche européenne pourrait venir compléter l’intervention militaire française, en ajoutant, à l’efficacité à court terme de la guerre, l’efficacité à long terme du développement. Les défis sont immenses dans cette région alors que le Mali continue d’être un des pays dont l’indice de développement humain est au plus bas. Cependant, il est possible que la France ait généré un certain sentiment de rancune chez certains états membres de l’UE en agissant de manière unilatérale et en démontrant sa puissance militaire.
La sécurité est une condition préalable fondamentale au développement. En ce sens, il est bon d’avoir ce genre d’enchainement où l’intervention militaire mène à des projets de développent. La coopération internationale sera la meilleure voie pour le développement du Mali. Quand des fonds seront nécessaires, des réunions internationales pour les soulever seront tenues à Bruxelles. Certains pourraient néanmoins sentir que l’UE doit maintenant payer pour les pots que la France a cassés. Il n’est pas infondé que certains pays perçoivent cette intervention comme une opération précipitée qu’ils n’ont pas soutenue. Ils sont maintenant réticents à coopérer et défendent de manière assez légitime d’ailleurs, qu’ils ne comprennent pas ou ne soutiennent pas pleinement ce qui se déroule. C’est une épée à double tranchant.
Sur le chemin du développement
Les problèmes de développement auxquels fait face le Mali sont des problèmes significatifs. Si un gouvernement légitime doit être élu, des changements profonds et fondamentaux doivent d’abord se faire au sein du système électoral. La classe politique de Bamako doit également porter son regard au-delà de la capitale. Pour l’heure, Bamako n’impose pas son autorité dans les autres parties du territoire, et c’est là que réside la principale cause de la menace terroriste.
Nous pouvons nous demander le rôle que jouera la France maintenant. Quand il n’existe pas d’intérêt commercial clair pour les pouvoirs internationaux, il y a une tendance à laisser les problèmes politiques et sociétaux du continent africain s’envenimer. D’autres conflits au Sahel ont été laissés à l’abandon depuis des décennies, ce qui pourrait à nouveau représenter une menace pour le Mali après le retrait des troupes françaises.
Afin d’avancer, je pense que la France devrait adopter une stratégie différente : elle doit combattre la stigmatisation de l’intervention de l’Union Européenne. Les médias ont joué un rôle important dans la description du pouvoir français comme étant efficace et de la puissance douce de l’Europe comme étant inefficace. Cette perception est à la fois fausse et dangereuse : cela pourrait potentiellement isoler la France d’une part, et peut-être même avoir l’effet inverse et repousser l’UE en dehors du Mali.

http://www.huffingtonpost.fr/cristina-barrios/lapresconflit-au-mali_b_2969473.html?utm_hp_ref=france

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