Les Chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) se sont réunis vendredi, dernier à Niamey.
Lors de ce sommet extraordinaire de la CEDEAO, dans le communiqué final, la Conférence confirme la date du 24 novembre 2019 pour la tenue du 1 er tour de l’élection présidentielle en Guinée-Bissau. A cet effet, elle instruit le Président de la Commission de prendre toutes les mesures nécessaires pour accompagner le processus électoral y compris le déploiement des observateurs électoraux afin d’assurer la crédibilité et la transparence du processus. La Conférence condamne fermement les décisions du Président Vaz de limoger le Premier Ministre Aristides Gomes et de nommer un nouveau Premier Ministre. Elle affirme l’illégalité de ces décisions par rapport à la Constitution de la Guinée-Bissau et le fait qu’elles sont contraires aux décisions prises par la Conférence lors de sa 55ème Session du 29 juin 2019 à Abuja. La Conférence réaffirme son plein soutien au Premier ministre Aristides Gomes et à son Gouvernement et les exhorte à continuer à assumer leurs responsabilités notamment la poursuite des efforts pour l’organisation de l’élection présidentielle du 24 novembre 2019.
A cet effet, la Conférence exige la démission immédiate du Premier Ministre nommé le 29 octobre 2019 et de tout son Gouvernement sous peine de sanctions individuelles. La Conférence rappelle que depuis le 23 juin 2019, le Président Vaz est un Président par intérim dont tous les actes doivent être contresignés par le Premier Ministre afin de leur donner une légalité.
Il faut noter que plusieurs Chefs d’Etat ont assisté à ce sommet extraordinaire, notamment les Présidents Alassane Ouattara de la Cote d’Ivoire ; Macky Sall du Sénégal ; Patrice GuillaumeTalon du Benin ; Faure Essozimna Gnassingbé du Togo ; George Manneh Weah du Liberia ; Nana Addo Dankwa Akufo-Addo du Ghana ; Julius Maada Bio de la Serra Leone ; le vice président du Nigeria, Pr. Yemi Osinbajo, la vice-présidente de la Gambie, Dr Isiatou Touray, le président de la Commission de la CEDEAO, M. Jean-Claude Kassi Brou et des représentants de l’Union Africaine et l’ONU.
Pour le président en exercice de la CEDEAO, Issoufou Mahamadou, « la crise politique que la Guinée Bissau traverse n’est pas nouvelle. Je voudrais rappeler que la CEDEAO s’est déjà beaucoup investie depuis 2015 pour y soutenir la normalisation sociopolitique et garantir la paix et la sécurité.
Dans le cadre de ces efforts, notre conférence a procédé à de nombreuses médiations et pris plusieurs décisions conformément à la Feuille de Route de l’Accord de Conakry d’octobre 2016. La mise en œuvre de ces différentes décisions et le soutien technique et financier de la CEDEAO et des autres partenaires régionaux et internationaux ont permis d’aboutir aux élections législatives du 10 mars 2019.
La tenue de ces élections législatives revêtait une importance cruciale pour remettre le pays sur la voie de la stabilité, dès lors que ces élections avaient été jugées transparentes, crédibles et acceptées par tous les acteurs.
Sur la base du résultat de ces élections législatives et d’un consensus obtenu au niveau de toutes les parties en conflit et en conformité avec les décisions prises par notre conférence, au sommet tenu le 29 juin 2019 à Abuja, un Premier Ministre a été nommé, un gouvernement mis en place et la date des élections présidentielles fixée au 24 novembre 2019. Dans le cadre de ce consensus le président de la république dont le mandat était arrivé à terme depuis le 23 juin 2019, a été maintenu en poste jusqu’à la fin du processus électoral.
Or à notre grande surprise, par un décret en date du 28 octobre 2019,le Président, limoge le Premier Ministre et son gouvernement et nomme un nouveau Premier Ministre, et un nouveau gouvernement, et ce à trois semaines du premier tour de l’élection présidentielle.
Une telle décision est de nature à remettre en cause le calendrier électoral cité plus haut, à créer un blocage politique des Institutions, et surtout, à accroître les risques de confrontation entre les différentes forces de défense et de sécurité nationales, sans oublier la Force d’appui à la paix de la CEDEAO (ECOMIB).
Nous sommes donc devant une situation de déstabilisation du pays avec des risques réels de guerre civile dans la mesure où le gouvernement mis en place par la majorité parlementaire et dont le programme a été adopté par l’assemblée nationale le 15 Octobre 2019, est demi par un Président de la République dont le mandat est arrivé à terme mais maintenu en poste suite au consensus de la classe politique validé par notre organisation.
Le Comité Ministériel de suivi de la CEDEAO, dépêché sur place, a réagi avec fermeté en dénonçant ce dérapage et a demandé, au nom de notre organisation, de poursuivre le processus électoral suivant le calendrier consensuellement arrêté ».
Pour sa part, le président de la commission de la CEDEAO, M Jean-Claude kassi Brou, cette présence massive et prompte des chefs d’Etat et de gouvernement au rendez-vous de Niamey démontre sans doute leur ferme volonté à prendre les dispositions nécessaires pour mettre fin à la crise politique qui secoue la Guinée Bissau. Elle est également la preuve de leur engagement et de leur détermination pour la paix, la stabilité et la démocratie en Guinée Bissau dans l’intérêt du peuple. Parlant de la situation, qu’il a qualifiée d’explosive en Guinée Bissau, le président de la Commission de la CEDEAO est revenu sur les efforts que déploie l’organisation sous régionale depuis le déclenchement de la crise pour éviter un autre scénario éprouvant à ce pays. Et pour cause, lors de son 55ème sommet ordinaire du 29 juin dernier, face au vide institutionnel né de l’arrivée à terme du mandat du Président guinéen, la communauté a pris les dispositions pour permettre la poursuite du processus jusqu’à l’élection présidentielle du 24 novembre 2019, en maintenant le président en poste, confiant la gestion des affaires courantes du pays au Premier ministre issu des législatives de mars 2019.
La CEDEAO s’est pleinement investie dans le processus électoral qu’elle souhaite faire aboutir à son terme a dit M Kassi Brou. Et c’est dans ce cadre que des missions ministérielles et techniques ont été dépêchées ayant permis d’enregistrer des progrès notables comme l’utilisation du fichier ayant servi à l’organisation des législatives, l’élaboration d’un bulletin de vote unique, la publication par la cour suprême des listes des candidats à l’élection présidentielle. « Mieux, les chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO ont décidé d’apporter une aide financière de 1,5millions USD en faveur de l’organisation de l’élection présidentielle » a dit le président de la Commission de la CEDEAO. C’est dans ce contexte et contre toute attente que le Président guinéen a décidé de limoger le Premier ministre et son gouvernement pour le remplacer par un autre Premier ministre issu de la minorité parlementaire. Le Président de la commission a laissé entendre que la décision du 28 octobre était aussi surprenante qu’incompréhensible parce que non seulement, elle ramenait le pays à la situation de 2015, compromettait l’élection présidentielle mais aussi « créait les conditions d’une instabilité, avec une menace sur la paix dans ce pays » a-t-il déclaré.
La situation dans laquelle la décision du président plonge le pays est inacceptable tant pour la majorité parlementaire guinéenne que pour la CEDEAOqui s’est beaucoup investie et depuis longtemps pour restaurer la paix et la stabilité dans ce pays, a souligné M Kassi Brou. Il a déploré la volonté manifeste d’utiliser la force pour faire prévaloir des décisions controversées avec le risque d’affrontements armés pouvant aboutir à une possible intervention de la force de la CEDEAO dont on pourrait tout à fait faire l’économie. Le président de la Commission a indiqué qu’il s’agit de tout faire « pour éviter une guerre civile tout en assurant la poursuite du processus électorale déjà entamé pour combler le vide institutionnel.
Dans son allocution de clôture, le Président Issoufou Mahamadou a indiqué que « Les recommandations issues de nos délibérations viennent de vous être présentées dans le Communiqué final de notre Session. Elles réaffirment, entre autres, notre soutien total au processus de sortie de crise déjà encours devant aboutir à l’organisation de l’électionprésidentielle le 24 novembre 2019, sous la conduite du Premier Ministre Mr Aristide Gomes et son gouvernement.
La Conférence en appelle à la collaboration de tous les acteurs politiques, administratifs, judiciaires et militaires de Guinée Bissau. La Conférence réitère ses remerciements aux Nations Unies et à l’Union africaine ainsi qu’à tous les partenaires financiers et techniques.
A quelques jours des élections présidentielles, la Conférence veut s’assurer de la bonne compréhension de ses décisions et de l’engagement de tous. C’est pour cela qu’une mission de Chefs d’Etat se rendra incessamment à Bissau pour rencontrer le Président Jose Mario Vaz.
Je ne doute pas un seul instant que notre action permettra de réconcilier les acteurs politiques Bissau guinéens et permettra des élections paisibles et crédibles à la date convenue ».
Par Tamtam Info News
November 11, 2019 at 12:45PM