Les dépêches de presse parlent de l’intensification des combats au Mali entre militaires et rebelles ethniques touaregs du Mouvement de libération nationale Azawad dans le nord de ce pays [1].
Comme les seules agences d’informations à portée mondiale et avec les fonds et les infrastructures pour maintenir des bureaux et des correspondants partout dans le monde sont celles qui résident dans les principaux Etats membres de l’OTAN : Associated Press, Reuters, Agence France-Presse, la BBC News et Deutsche Presse-Agentur, la couverture de l’actualité au Mali, comme ce qui se produit dans presque n’importe quel autre pays, reflète un parti pris de l’Ouest et un ordre du jour de l’Ouest.
Par conséquent, les titres typiques sur le sujet, sont les suivants :
- Reuters : « Les armes et les hommes en provenance de Libye renforcent la rébellion au Mali »
- CNN : « Président : des combattants touareg de Libye attisent de la violence au Mali »
- The Scotsman : « les touareg armés du colonel Kadhafi ont touché le Mali »
- Agence France-Presse : « La France dénonce les meurtres de l’offensive rebelle au Mali »
- Voice of America : « Mali : La France condamne les atrocités attribuées aux rebelles touaregs »
Pour atteindre le Mali depuis la Libye c’est un voyage d’au moins 800 kilomètres à travers l’Algérie et / ou le Niger. Comme les rebelles évidemment n’ont pas de force aérienne, ni d’avions de transport militaire, les manchettes et la propagande ci-dessus implique que les combattants touaregs ont couvert à pied tout le chemin depuis la Libye jusqu’à leur pays dans des convois avec des armes lourdes à travers au moins un autre pays sans être détectés ou empêchés par les autorités locales. Et tout cela, en outre, pour lancer une offensive trois mois après l’assassinat du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi après que son convoi ait été attaqué par les bombes françaises et les missiles Hellfire US en Octobre dernier. Mais l’implication selon quoi que l’Algérie et le Niger, en particulier la première, sont complices de la circulation des combattants touaregs et des armes de la Libye vers le Mali est de mauvais augure en termes d’expansion des accusations -et des actions- occidentales dans la région.
Des Rébellions armées sont traités de façon différente dans les nouvelles du monde dominé par l’Occident selon la façon dont les rebelles et les gouvernements auxquels ils s’opposent sont considérés par les membres supérieurs de l’OTAN.
Ces dernières années, ces derniers ont fourni un soutien militaire et logistique aux formations rebelles armées -dans la plupart des cas d’attaques frontalières et à but séparatistes et irrédentistes – au Kosovo, en Macédoine, au Libéria, en Côte-d’Ivoire, en Libye et en Syrie d’aujourd’hui, et sur les front d’espionnage et « diplomatiques » en Russie, Chine, Pakistan, Soudan, Indonésie, Congo, Myanmar, Laos et Bolivie.
Cependant, les grandes puissances de l’OTAN ont adopté la direction opposée quand il s’agit de la Turquie, du Maroc (avec ses 37 années d’occupation du Sahara occidental), de la Colombie, des Philippines, de la République Centrafricaine, du Tchad et d’autres nations qui sont leurs clients militaires ou se trouvent dans des territoires contrôlé par eux, où les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux fournissent des armes, des conseillers, des forces spéciales et les dites forces de maintien de la paix.
Le battement de tambour de nouvelles alarmantes sur le Mali est le signe que l’Occident à l’intention d’ouvrir un nouveau front militaire en Afrique après la campagne aérienne de 7 mois, les forces navales et spéciales contre la Libye et la poursuite des opérations en Somalie et en Afrique centrale avec le récent déploiement des forces spéciales des Etats-Unis en Ouganda, au Congo, dans la République centrafricaine et au Sud-Soudan. En février, en Côte-d’Ivoire, voisin au sud du Mali, l’armée française, avec les complaisantes troupes des Nations Unies– « soldats de la paix » – ont effectué des tirs de roquettes sur la résidence présidentielle et démis par la force le président Laurent Gbagbo.
Le Commandement pour l’Afrique des Etats-Unis (AFRICOM) est devenu opérationnel pour la première fois en tant que force de combat dans ce qui devait être le début de la première quinzaine de la guerre contre la Libye en Mars [2011] avec l’« Opération Odyssée Dawn » avant de transférer la campagne vers l’OTAN pendant sept mois d’incessants bombardements et attaques de missiles.
Le Mali pourrait devenir la seconde opération militaire de l’AFRICOM.
Le pays, enclavé, est le rayon de la roue de l’ancienne Afrique occidentale française, avec des frontières avec presque tous les pays membres, sauf le Bénin : le Burkina Faso, la Guinée (Conakry), Côte-d’Ivoire, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal. Il partage également des frontières avec l’Algérie, autre ancienne possession française, vers le nord.
Le Mali est le troisième producteur d’or en Afrique, après l’Afrique du Sud et le Ghana. Il a des gisements d’uranium considérables gérés par des concessions françaises dans le nord, scène des combats actuels. les exigences des touaregs portent sur l’obtention d’un certain contrôle sur l’extraction d’uranium et la répartition des recettes qu’ils génèrent. Des explorations importantes de pétrole et de gaz naturel, également dans le nord, ont été aussi menées récemment.
La nation est aussi un élément clé dans la « Coopération contre le terrorisme Trans-Sahara des États-Unis »créée en 2005 (d’abord comme Initiative contreterrorisme Trans-Sahara), qui a résulté de l ’« Initiative pan-Sahel » pour 2003-2004.
En mai, les « opérations spéciales de commandement en Europe, des États-Unis » a lancé la « Trans-Sahara Counterterrorism initiative » en envoyant 1.000 soldats des forces spéciales au Nord-Ouest de l’Afrique pour l’ « Opération Flintlock » (« Opération Gun Spark ») afin de former les forces armées du Mali, Algérie, Tchad, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tunisie, les sept membres de départ africains de la « Trans-Sahara Counterterrorism initiative », qui, dans son format actuel comprend également le Burkina Faso, le Maroc et le Nigeria. La Libye sera bientôt introduite dans ce format ainsi que la coopération militaire du dialogue méditerranéen de l’OTAN.
Les Forces Spéciales des Etats-Unis ont mené la première de ce qui est devenue les « Opérations Flintlock » annuelles d’exercices de contre-insurrection avec les nations mentionnées dans le Sahel et le Maghreb. L’année suivante, l’OTAN a mené des jeux de guerre à grande échelle de la « Steadfast Jaguar » dans l’île du Cap-Vert pour lancer la Force de réaction de l’OTAN, en vertu de laquelle elle a façonné la Force africaine auxiliaire.
« Flintlock 2007 » et « 2008 » ont eu lieu au Mali. « Flintlock 10 » dans plusieurs pays africains dont le Mali.
Le 7 Février de cette année, les États-Unis et le Mali ont lancé l’exercice de parachutage conjoint « Atlas Accord 12 » dans la nation africaine, mais le « Flintlock 12 », prévu pour au plus tard ce mois-ci, a été reporté en raison des combats dans le nord. Devaient y être impliqués seize pays, y compris plusieurs des principaux alliés des États-Unis dans L’OTAN.
Le « Flintlock 11 » l’an dernier comprenait des unités militaires provenant des États-Unis, Canada, France, Allemagne, Hollande, Espagne, Mali, Burkina Faso, le Tchad, la Mauritanie, le Nigeria et le Sénégal.
Lorsque l’AFRICOM est devenu un « Commandement de combat unifié indépendant » le 1er Octobre 2008, le premier nouveau commandement militaire régional des États-Unis mis en place à l’étranger dans l’après-guerre froide, l’ « AFRICOM and Special Operations Command Africa’s Joint Special Operations Task Force-Trans Sahara » a pris le contrôle des exercices « Flintlock » du « Commandement européen des États-Unis » et du « Commandement européen des opérations spéciales des Etats-Unis ».
En 2010, l’AFRICOM a annoncé que le « Commandement des opérations spéciales en Afrique » va prendre le contrôle de la « Task Force d’opérations spéciales Trans Sahara (JSOTF-TS) » et du « commandement des Opéerations spéciales et contrôle des éléments-Corne de l’Afrique (SOCCE-HOA). »
L’année dernière, la page Web de l’AFRICOM a écrit :
« Réalisé par Special Operations Command Africa, Flintlock est un exercice multinational interarmées pour améliorer l’échange d’informations aux niveaux opérationnel et tactique dans la région du Sahara, tout en favorisant une collaboration et coordination plus accrue. Il met l’accent sur l’interopérabilité militaire et la capacité d’intervention pour les États-Unis et les pays partenaires américains et européens, et les unités sélectionnées dans le Nord et Afrique de l’Ouest. »
Bien que le but déclaré de la Coopération « Trans-Sahara Counterterrorism » et de ses exercices multinationaux « Flintlock » est de former les militaires des pays du Sahel et du Maghreb dans la lutte contre les groupes extrémistes islamiques de la région, en fait, les États-Unis et leurs alliés ont livré une guerre contre le gouvernement libyen l’année dernière avec l’appui d’éléments similaires, et l’application pratique de la formation militaire et le déploiement du Pentagone en Afrique du Nord et de l’Ouest a été la lutte contre les milices touaregs plutôt que des groupes comme « Al-Qaïda du Maghreb islamique » ou « Boko Haram » au Nigeria.
Les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont également effectué et appuyé d’autres exercices militaires dans la zone à des fins similaires. En 2008, la « Communauté économique des États d’Afrique occidentale » (CEDEAO), groupe économique régional qui a été formé par la « Force auxiliaire d’Afrique de l’Ouest », soutenu par les États-Unis et l’OTAN, a mené un exercice militaire appelé « Jigui 2008 » au Mali, « soutenu par les gouvernements des pays hôtes ainsi que la France, le Danemark, le Canada, Allemagne, Hollande, Royaume-Uni, États-Unis et l’Union européenne », comme l’a rapporté l’agence Ghana News à l’époque.
L’AFRICOM dirige également des exercices de l’« Afrique Endeavor » interopérabilité multinationale des communications principalement en Afrique de l’Ouest. La conférence de planification a eu lieu l’an dernier à Bamako, capitale du Mali et, selon l’armée US en Afrique, « a réuni plus de 180 participants provenant de 41 pays africains, d’Europe et d’ Amérique du Nord ainsi que des observateurs de la Communauté économique des Afrique de l’Ouest (CEDEAO), Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC), la Force auxiliaire Afrique de l’Est et de l’OTAN pour planifier les tests d’interopérabilité des systèmes de communication et d’information des nations participantes. » Le principal exercice a également été mené au Mali.
L’armée US est installée dans ce pays depuis au moins 2005 et Voice of America a révélé que le Pentagone avait « mis en place un centre temporaire d’opérations dans une base aérienne près de Bamako au Mali. L’installation fournira des services de soutien logistique et d’urgence pour les troupes américaines pour former les forces locales dans cinq pays de la région. »
L’année suivante, le Commandement européen des États-Unis et le chef du Commandant suprême de l’OTAN en Europe le général James Jones des Marines premier conseiller de sécurité nationale de l’administration Obama, « a fait cette révélation [que] le Pentagone veut avoir accès à des bases … aux Sénégal, Ghana, le Mali et le Kenya et d’autres pays africains », selon un article au Ghana Web.
En 2007, un soldat du premier bataillon, Groupe spécial de Forces 10 basé à Stuttgart, en Allemagne, qui abrite le siège de l’AFRICOM, est mort à Kidal, au Mali, où l’on combat en ce moment. Sa mort a été attribuée à un « incident non liés au combat ». L’année suivante, un soldat du programme d’aide militaire et de formation des Forces canadiennes a aussi perdu la vie au Mali.
L’année dernière, le Régiment d’opérations spéciales du Canada a envoyé des troupes dans la zone de conflit dans le nord du Mali pour ce qui a été décrit comme « une mission permanente ». Des Forces du Régiment canadien d’opérations spéciales a également participé à l’exercice « Flintlock 11 » au Sénégal.
En Septembre 2007, un avion US de transport militaire, un Hercule C-130, a été touché par des tirs de fusil tandis qu’il parachutait du matériel aux troupes maliennes assiégées par les forces touareg.
Selon Stars and Stripes :
« L’avion et son équipage appartenant au 67è Escadron d’Opérations Spéciales, étaient au Mali dans le cadre d’un exercice déjà prévu appelé « Flintlock 2007 » … les troupes maliennes ont été cernées dans leur base dans la région de Tin-Zaouatene près de la frontière algérienne par des combattants armés et ne pouvaient pas se ravitailler … Le gouvernement du Mali a appelé les forces des États-Unis pour que soit mené un parachutage … »
En 2009 aux États-Unis annoncé qu’elles avaient fourni au gouvernement du Mali plus de 5 millions de dollars en nouveaux véhicules et autres équipements.
Plus tard la même année sur le site de la Force aérienne US en Europe a été rapporté :
« La première mission du C-130J Super Hercules en appui de la Force Aérienne des États-Unis en Afrique, ou 17è Air Force, a ouvert la porte à la future coopération de soutien entre la 86e Airlift Wing et les futures missions en Afrique.
« Le commandant de bord de la mission, le Major Robert May du 37ème escadron Airlift, et son équipage ont reçu l’ordre de voler au Mali le 19 Décembre pour ramener à la maison 17 soldats qui aidaient à la formation des forces maliennes. »
Les États-Unis ont été impliqués dans la guerre du Mali pendant près de douze ans.Les histoires récentes sur des atrocités dans les médias occidentaux alimenteront la demande d’intervention sous la « responsabilité de protéger » dans le style de celles de la Côte d’Ivoire et de la Libye l’an dernier et de fournir un prétexte à une intervention militaire des Etats-Unis et des pays de l’OTAN.
C’est possible que l’AFRICOM soit en train de planifier sa prochaine guerre.
Rick Rozoff, Chicago, le 16 février 2012.