La guerre à huis clos : la formule de Jeune Afrique sur
la guerre du Nord-Mali est des plus pertinentes. Toujours peu de sources
indépendantes. Et naturellement, même les recoupements se contentent
généralement de citer les sources de l’armée malienne et du Mnla.
Vitrine de cette véritable bouteille à l’encre : la bataille de
Tessalit. Plusieurs titres de la presse malienne et des radios libres de
la place avaient déjà donné leur bilan : côté rebelle, une centaine de
morts, soixante dix véhicules calcinés. Bref, un massacre dans les rangs
du Mnla dont la rue s’était réjouie et qui a suscité d’émouvantes
motions d’encouragement à nos « vaillantes forces armées ». Côté Mnla,
même triomphalisme.
La communication plus moderne de la rébellion ne se contente pas, à travers les sites pro-berbères à signer des articles de « reporters sur le front » qui décrivent par le menu, comme par le week-end la bataille en cours dans cette garnison.
Naturellement pour eux, the winner is… les troupes du Mnla! A ces
articles flatteurs pour les rebelles, s’ajoutent les nombreuses
réactions facebook favorables au Mnla qui a également son espace youtube
sur lequel on peut entendre un « Peul » appeler ses parents à rejoindre
Zakak pour la libération du pays.
Et aussi des images de présumés prisonniers de l’armée malienne,
s’exprimant en français et ou en bamanan sur les circonstances de leur
capture et les « bons traitements » dont ils bénéficient de la part de
leurs geôliers. Subtils détails donnés par ces « reporters » avec un air
tout naturel : Ould Meydou ne rencontrerait pas plus de succès à
Tessalit qu’à Aguel Hoc en janvier. Il aurait subi beaucoup de pertes le
week-end alors que côté gouvernemental, on se félicite de la
progression de l’armée et de son inexorable avancée sur Tessalit.
La dépêche de AP citant même un officiel américain puis celle de Afp
annonçant le ravitaillement de l’armée malienne par l’aviation
américaine au Mali pour l’Opération Flintlock n’est pas pour percer le
mystère. Il est vrai que la presse étrangère, Rfi, la principale source
d’information n’est pas du tout en odeur de sainteté à Bamako. « C’est
une radio subjective et pro Mnla » dit de plus en plus clairement la rue
malienne. La radio mondiale n’est pas en effet servie par sa
nationalité française. D’autant que pour le citoyen lambda à Bamako
comme à Kayes, c’est une guerre par procuration que le Mnla est en train
de livrer au Mali. Avec pour marionnettiste : un certain Nicolas
Sarkozy.
L’information publiée vendredi sur le site mauritanien Taqadoumy
n’aidera pas les choses, en révélant que Paris comme le Mnla rejette
toute implication d’Aqmi dans les atrocités d’Aguel Hoc que de Raincourt
avait pourtant condamnées. Si les Français le pensent vraiment, c’est
une déclaration de guerre à Bamako qui n’a pas, il faut le rappeler,
rendu public à la presse le rapport d’enquête incriminant les
salafistes.
Adam Thiam
Adam Thiam